19/05/2021
Michel Lutz, Group Data Officer chez Total, est récemment intervenu sur Linkedin pour évoquer les évolutions que connaît le métier de Data Scientist. Selon lui, l’impact de la donnée est de plus en plus important, c’est un élément clé de la transformation des organisations et de la société. Chez Total, la Data et ses représentants contribuent largement à toute la chaîne de valeur et à l’ambition Climat du Groupe. Il nous en dit plus.
Comment occupez-vous vos journées chez Total ?
Je travaille chez Total depuis plus de 5 ans et j’y porte deux casquettes. D’un côté, je suis Group Data Officer, je définis les grandes lignes de la transformation Data du groupe. De l’autre, je suis responsable de l’équipe Data de la Total Digital Factory, qui regroupe plus de 30 experts en gestion de projets Data, Data management et Data Science, et dont je suis super fier.
Entendre dire que le métier de Data Scientist est à son crépuscule, ça vous agace ?
Ces métiers de la Data science, je les connais très bien. C’est pourquoi je me suis permis de revenir sur LinkedIn, sur la fin présumée du métier de Data Scientist. Selon moi, c’est plutôt la fin de la bulle Marketing autour de la Data Science. Cette idée qu’on pouvait s’improviser Data Scientist et qu’il suffisait de s’appuyer sur des outils magiques pour tirer de la valeur des données. Les métiers des professionnels de la donnée et de l’analyse numérique vont perdurer et même se complexifier. Quelle que soit leur appellation, on a toujours autant besoin d’eux et il faut le dire. Beaucoup de jeunes se lancent dans des études difficiles, des professionnels se reconvertissent, il faut respecter ces personnes et peser ses mots avant de décréter la fin d’un métier.
Ce qui est clair, c’est que les compétences attribuables à un Data Scientist ont évolué. Le métier est « sorti du labo ». On attend de lui qu’il code proprement, qu’il sache gérer ses modèles une fois en production (MLOps dans le jargon), qu’il sache intégrer efficacement ses modèles dans les processus de prise de décisions humaines et gérer les interactions software/humain (on parle de plus en plus de MLUX). Très important aussi, il doit savoir trouver sa place dans tout le processus de production d’un logiciel d’aide à la décision : il doit travailler efficacement avec des Data engineer, des Software developers, des Devops, des Data managers, des Product owners etc.
Peut-on encore parler de Data Scientist au singulier ?
Le cœur de métier historique du Data Scientist a changé. On est revenus des approches du « tout big Data » ou « tout machine learning », car les problématiques rencontrées sur le terrain sont souvent plus délicates. Elles nécessitent d’avoir recours à tout un ensemble de méthodes d’analyse et de modélisation variées : machine learning bien sûr, mais aussi statistiques et probabilités « à l’ancienne », recherche opérationnelle et simulation numérique, modélisation de règles et d’heuristiques métier.
C’est très riche et ça rend le métier passionnant. Dans la pratique évidemment, c’est rare qu’une seule et unique personne soit experte dans tous ces domaines. Il faut bien souvent toute une équipe qui, collectivement, parvient à couvrir l’ensemble de ces compétences, et apporte ainsi des réponses à des problèmes complexes. Il faut aimer jouer collectif, c’est notre fonctionnement à la Total Digital Factory.
Comment ce métier vit-il chez Total ?
Si les Data Scientists de la Total Digital Factory peuvent bien travailler, c’est notamment parce qu’on récolte les fruits de plusieurs années de chantiers de transformation autour de la Data. Ces dernières années ont permis l’amélioration de nos plateformes techniques (pour accéder aux données et déployer des outils pour les valoriser) et la mise en place de collaborations technologiques, tel que notre partenariat avec Microsoft, mais aussi l’amélioration continue de nos processus de Data management (pour garantir la maîtrise et la qualité de nos données). Ces chantiers complexes et de longue haleine sont menés avec la Direction informatique de Total, et des Data Officers - ainsi que leurs équipes - en charge de nos principaux domaines de données. On est aussi portés par la diffusion de la culture Data au sein du Groupe, sujet essentiel que je traite notamment avec la Direction de la formation. Je remercie, sincèrement, toutes les personnes qui travaillent avec moi sur ces sujets, qui nous offrent encore de beaux challenges à relever.
Tout cela s’inscrit naturellement dans l’histoire de Total, qui n’a pas attendu de parler de Data Science pour être un gros acteur de la donnée. Dans le domaine des géosciences, par exemple, on travaille depuis longtemps déjà les données sismiques. Total, c’est aussi beaucoup d’ingénieurs et de scientifiques, la culture de la donnée est forcément omniprésente. Pour être plus factuel, je vous invite à découvrir cette vidéo qui démontre bien que la Data chez Total, il y en a partout, quelque soient nos métiers !
La Data est donc déjà fortement intégrée chez Total mais comment a-t-elle été mise au service de la transition énergétique et de l’ambition Net Zero ?
Chez Total, nous souhaitons développer l’autonomie et faciliter l’accès à la donnée, et donc à un premier niveau d’analyse. C’est un super levier d’accélération : la valorisation de la donnée ne doit pas passer que par les Data Scientist, elle doit également être délivrée par l’acculturation de nos collègues à l’usage de la donnée et ses évolutions. Cela nécessite un travail constant de formation et d’amélioration de nos plateformes technologiques. En complément, la Total Digital Factory développe des logiciels qui embarquent des outils et des méthodes de valorisation de la donnée plus complexes, en cycles courts de 6-8 mois, pour apporter à ces métiers des solutions logicielles supplémentaires. La Data est, de cette manière, un moyen mis au service des salariés et des stratégies des métiers du Groupe pour contribuer à son ambition Net Zero.
A noter que d’autres dispositifs de valorisation de la donnée existent dans le Groupe : des centres d’expertises proches des métiers garantissent le déploiement des applications de la Total Digital Factory. Nous avons créé un centre d’innovation en Inde avec Tata Consultancy Services et les équipes R&D, quant à elles, s’appuient sur des approches Data et Intelligence artificielle pour travailler sur des projets complexes, comme la modélisation des réseaux d’énergie, le design de nouvelles cellules de batteries, ou encore la capture et le stockage du CO2.
Quelles sont précisément les projets de la Total Digital Factory au service de la transition énergétique ?
Si la Data est omniprésente dans le Groupe et que le développement d’applications n’est pas réservé à la Total Digital Factory, celle-ci a tout de même un rythme particulier. On y développe, en effet, 40 à 50 applications par an sur la base de cycles de développement allant de 6 à 8 mois. Quelques exemples ?
L’application VADER -rien à voir avec Star Wars- permet, par exemple, aussi bien d’estimer la consommation attendue en électricité et gaz des raffineries, que de détecter et d’anticiper des dépassements. C’est de cette manière qu’elle contribue à la maîtrise de la consommation et de l’empreinte carbone de nos opérations industrielles. Les modèles Data Science ont été construits par petits incréments, en interaction directe avec les utilisateurs. Ceux-ci ont validé chaque amélioration des modèles, pour s’assurer que les efforts des Data Scientists apportent bien un bénéfice concret.
L’application SAFT4MATION, quant à elle, utilise des méthodes de machine learning pour optimiser le flux de production d’une usine de batteries. Elle a eu un fort impact en termes de transformation, puisqu’un employé au sein de l’usine est désormais en charge de suivre l’évolution du modèle et de garantir la qualité des données qui l’alimentent.
Le patrimoine de données à disposition de nos Data Scientist, et de plus en plus à l'ensemble des collaborateurs, est une opportunité pour mettre les nouvelles technologies au service de notre expertise historique et façonner ainsi le futur de l'énergie.
Pour cela, La Total Digital Factory est l’incubateur idéal, un espace de création et d'innovation singulier au sein du Groupe.