27/01/2022
Depuis le coup d’Etat survenu le 1er février 2021 au Myanmar, TotalEnergies a en plusieurs occasions condamné de la manière la plus ferme les abus et violations des droits humains qui s’y déroulent.
Par la suite, nos décisions ont été guidées par des principes clairs : arrêter tous nos projets en cours, mais continuer à produire le gaz du champ de Yadana car il est essentiel à l’alimentation en électricité des birmans et des thaïlandais, protéger nos collaborateurs contre le risque de poursuites pénales ou de travail forcé, limiter les flux financiers vers la société nationale pétrolière MOGE. Enfin, comme il ne nous était pas possible de mettre fin au versement des impôts et taxes que nous devions, j’avais annoncé que TotalEnergies verserait à des associations pour les droits humains en Birmanie l'équivalent des impôts dont la Compagnie doit s’acquitter dans le pays, ce que nous avons fait.
En dépit des actions entreprises, nous constatons que TotalEnergies n’a pas été en mesure de satisfaire les attentes de nombreuses parties prenantes avec lesquelles nous échangeons régulièrement. Plusieurs actionnaires et organisations de la société civile internationale ou birmane nous demandent de mettre fin aux revenus dont bénéficie l’Etat du Myanmar via la société d’Etat MOGE. Nous avons essuyé beaucoup de critiques alors qu’il nous était matériellement et légalement impossible de faire cesser ces versements, puisque l’essentiel des paiements liés à la vente du gaz sont effectués directement par la société thaïlandaise PTT, acheteur du gaz à l’export.
En parallèle de nos actions, nous avons saisi les autorités françaises pour envisager la mise en place de sanctions ciblées sur les flux financiers. De telles sanctions auraient visé à cantonner tous les flux financiers des partenaires de Yadana sur des comptes séquestres, et ce, sans arrêt de la production de gaz qui aurait pénalisé les populations civiles. Nos démarches en ce sens n’ont malheureusement pas abouti car nous n’avons pas identifié de voies d’action pour y parvenir, les éventuelles sanctions européennes n’ayant pas de portée « extraterritoriale ».
Après les dilemmes que j’avais évoqués en avril 2021, force est de reconnaître qu’aujourd’hui est venu le temps de l’impasse. Si nous considérons que notre présence dans un pays nous permet de promouvoir nos valeurs, y compris en dehors de notre sphère directe d’activités, le contexte qui n’a cessé de se dégrader au Myanmar en matière de droits humains et d’Etat de droit, nous a conduit à réévaluer la situation et ne permet plus à TotalEnergies d’apporter une contribution positive suffisante dans ce pays.
C’est avec regret mais en pleine responsabilité, après avoir étudié toutes les alternatives, que j’ai décidé que TotalEnergies cessera toutes ses activités au Myanmar et se retirera du champ de Yadana à l’issue du délai contractuel de six mois. Cette décision est cohérente avec notre volonté de placer le développement durable, dont les droits humains, au cœur de la stratégie, des projets et des opérations de TotalEnergies. Pendant cette période de transition, TotalEnergies continuera d’agir en opérateur responsable afin d’assurer l’approvisionnement en énergie des populations concernées.
Quitter un pays dans lequel notre Compagnie a été présente pendant trente ans n’est pas une décision facile, d’autant moins que nous avons été les témoins privilégiés des progrès accomplis par les institutions birmanes au cours des dix dernières années avant le coup d'Etat de février 2021. J'espère sincèrement que notre décision sera entendue de tous les acteurs concernés afin de préserver la vie et la dignité des citoyens du Myanmar.
Patrick Pouyanné, président-directeur général de TotalEnergies